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Les préjugés sur des jeunes mal éduqués, paresseux, égoïstes : épisode 2, le mythe d’une génération trop gâtée

L’antienne est revenue en force pendant la pandémie de Covid-19. « Il leur faudrait une bonne guerre » à ces jeunes qui ne savent pas ce qu’est une existence difficile, ont rétorqué certains, lorsque des médias ont relayé le malaise grandissant des jeunes générations. Le préjugé est tenace : les jeunes d’aujourd’hui seraient trop gâtés et auraient toujours eu tout ce qu’ils voulaient sans effort. Pour cette raison, ils ne supporteraient plus aucune frustration, voire se montreraient capricieux et paresseux.
Mais les anciens enfants rois qu’on aurait trop choyés ont-ils vraiment la vie plus facile que leurs parents ? Le chercheur Camille Peugny, professeur de sociologie et auteur de Pour une politique de la jeunesse (Seuil, 2022), rappelle au contraire que les jeunes d’aujourd’hui subissent des conditions d’entrée dans la vie active de plus en plus drastiques, avec une précarisation croissante lors des études, des emplois précaires ou une difficulté d’accès au logement.
Ils se confrontent à une précarisation grandissante de l’entrée sur le marché du travail. Alors que dans les années 1980, 15 % des jeunes de moins de 25 ans en emploi occupaient un poste précaire, cela concerne aujourd’hui plus de 50 % d’entre eux. Après la fin des études secondaires ou supérieures, on constate un déclin du nombre de jeunes qui s’insèrent rapidement et se maintiennent dans un emploi stable. Ils doivent composer avec une forte augmentation des contrats à durée déterminée, de l’intérim, des stages pour beaucoup non rémunérés. Cette entrée précaire a des conséquences durables sur le parcours, avec un « effet cicatrice » sur le long terme désormais documenté.
A cela s’ajoute un taux de chômage qui, certes, a baissé pour toute la population, mais qui reste largement plus élevé pour les jeunes que pour le reste des Français, de deux à trois fois, peu importe la conjoncture. Cette précarité de l’insertion grignote le cycle de début de vie.
Le coût d’accès au logement pour les jeunes est de plus en plus élevé. Dans les zones les plus tendues où les jeunes s’insèrent, pouvoir ne serait-ce que devenir locataire nécessite d’avoir un garant familial aisé. Pour espérer devenir propriétaire, bénéficier de dotations des parents est également devenu crucial. Ce qui creuse nettement le fossé entre les jeunes selon leur origine sociale.
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